Les articles des 22 et 24 juillet nous ont fait vivre les deux premières journées de la reconnaissance du parcours de l'
Ultra Trail du Mont-Blanc (170 km / 10000 m D+), un périple en trois étapes organisé par Bruno Lagarde en compagnie d'Amandine, Stéphane, Jean-Vincent et Julien Carlier...
Après une nuit passée au
gite Bon Abri de Champex, Bruno reprend la "plume" pour partager avec nous les dernières péripéties de cette expédition à rebondissements multiples autour du Mont-Blanc...
(choix des illustrations, légendes: Pierre P.)
"A l'aube du 3ème et dernier jour, je me réveille spontanément à 5h avec une faim tenace. Je me lève donc 1h avant mes camarades qui ronflent comme des bienheureux (surtout Stef) et prends le temps d'une remise en ordre complète : douche, rasage, étirements, lecture et copieux petit déjeuner. Le reste de la troupe me rejoint: Julien sent son genou d'attaque mais nous informe qu'il s'est fait arrêter la veille par la gendarmerie Suisse: dépourvu de papiers avec une voiture qui n'était pas à son nom, les keufs n'ont pas trouvé la plaisanterie à leur goût et ont exigé de Julien qu'il quitte le territoire Suisse sous 24h ! Quant à JV, il nous annonce que c'est aujourd'hui l'anniversaire de son fils et qu'il doit être rentré à Cham pour 18h afin d'emmener ses enfants au cinéma. Bon, fort bien, on va y aller alors... !
Un tour du Mont-Blanc signé Bruno (clic gauche pour agrandir)Nous nous débarrassons de toutes nos affaires superflues dans la voiture de Julien et commençons à trottiner en direction de l'alpage de Bovine, la 1ère difficulté du jour. Autant ce col est redouté en course du fait de ses grosses marches, de sa raideur et des torrents d'eau qui le ravinent dès qu'il pleut, autant il passe en douceur dans la fraîcheur du petit matin ensoleillé. A son sommet, nous avons la vue dégagée sur Martigny, sur la vallée du Rhône dans sa partie Valaisanne et sur le tracé du
Kilomètre Vertical de Fully, où nous retournerons très certainement en octobre prochain.
Nous entamons la descente sur le col de la Forclaz à vive allure, emmenés par une Amandine survoltée. Au 1/3 de la descente, Julien pousse un cri : sa cheville a vrillé et craqué. Ca fait mal ! Il boitille quelques instants puis repart, un peu moins vite : ça devrait aller...Arrivés au
Col de la Forclaz, je dissuade la troupe de prendre un café car j'ai déjà eu l'occasion de pratiquer les tarifs locaux : 5 € le café pourri...et ça, c'était avant la réévaluation du Franc Suisse ! Nous enchainons donc rapidement en direction de Trient où nous ne trouvons malheureusement pas le moindre troquet.
A la sortie de Trient, à l'attaque de la 2ème difficulté du jour, le
Col de Catogne, je commets une erreur : je prends un sentier dont il me semble reconnaître l'intersection. La suite nous apprendra qu'il fallait en prendre un autre, 100m plus loin. Le début du « mauvais » sentier me semble toutefois familier : je persiste donc dans mon erreur. Puis il se rétrécit, se raidit gravement, traverse une forêt dévastée et là, je ne reconnais plus rien. Cependant, en bon Trailex Bourinus, je persévère sur 400m D+ environ. Au bout d'1/2 heure, je me rends à l'évidence : nous partons dans la direction opposée à la bonne et, malgré l'insistance de JV persuadé que tous les chemins mènent à Rome, je recommande vivement à la troupe de redescendre à Trient pour y reprendre le bon sentier. Personne ne proteste, merci et pardon les amis !
Après avoir passé Catogne sans encombre, mais non sans sueur, avec vue sur le barrage d'Emosson et le Buet, nous descendons en direction du domaine skiable de Vallorcine et, par la même occasion, repassons en France. Nous commettons une 2ème petite erreur de parcours (mais cette fois, c'est pas ma faute, c'est celle d'Amandine !), sans gravité. JV demande s'il peut « tirer tout droit » en direction du col de Balme pour couper au plus court vers Chamonix. Je lui réponds que seul, sans connaître le terrain et sans carte, ça ne me semble pas être une bonne idée.
Rencontre avec un jeune bouquetin..."moment magique" (Amandine)Nous arrivons donc à 5 au petit restau qui jouxte la gare de
Vallorcine. Pendant le repas, le principal sujet de discussion réside en une terrible équation : comment se faire un bon restau tous ensemble à Cham sachant qu'il est déjà 14h, qu'il reste environ 4 à 5 heures de trip dont une grosse difficulté (La Tête aux Vents), qu'il faut se doucher, se changer et récupérer la voiture de Julien à Champex (à 1h15 de route de Cham) ? Calculez comme vous voulez, vous verrez que c'est très chaud ! Nous réservons donc par téléphone un restau de spécialités savoyardes à Cham, le plus tard possible, soit 22h30. Oulala, y va faire faim d'ici-là !
Je propose donc de partir devant, seul, et de rallier les Houches
(point de départ/arrivée de la reco) le plus vite possible afin de me doucher, me changer, prendre ma voiture et récupérer Amandine et Julien quelque part entre Cham et les Houches afin de les emmener à Champex où eux se doucheront à leur tour (Stef et JV, qui n'ont aucune raison d'aller à Champex, nous retrouveront directement au restau).
Je pars donc bille en tête en direction du
col des Montets puis de la
Tête aux Vents. Arrivé à
la Flégère, avant la descente finale sur Cham, je prends un Coca et une tuerie de crumble en terrasse afin de profiter de l'extraordinaire vue sur le Mont Blanc.
Cela dit, je ne m'attarde pas trop car j'aperçois au loin Amandine à l'approche : j'ai une mission à assumer, moi, Monsieur ! J'entame donc la longue descente sur Chamonix que je devrais rallier en un peu moins d'une heure.
La traversée de
Chamonix est épique : sale, transpirant, puant, avec mes bâtons dans le dos, je me fraye un chemin à travers la foule compacte qui arpente la rue principale : le retour à la civilisation est violent !
Au téléphone, Amandine m'annonce qu'elle est à l'entrée de Cham, donc a priori pas très loin derrière moi. Elle ajoute qu'ils vont attendre mon retour en voiture à la terrasse d'un café : un peu agacé et abrupt, je lui réponds qu'il n'en est pas question et que, sauf blessure ou épuisement, nous devons tous boucler notre boucle (quel con doit-elle se dire à juste titre !). J'apprends parallèlement que Julien, en arrivant aux abords de Cham, est reparti dans la direction opposée et s'apprête donc à faire un 2ème tour du Mont Blanc à l'envers, et que JV a pris le train à Vallorcine pour retrouver sa famille au plus tôt. Bref, ça sent un peu la débandade finale!
Les ombres s'allongent sur le Mont-Blanc...ça sent l'écurie ! (clic gauche pour agrandir)Après ma traversée héroïque de Cham, j'emprunte les 10 derniers km de sentier vallonné qui longent l'Arve en direction
des Houches (en réalité, vous l'avez compris, ce sont les 10 1ers km de l'UTMB). Arrivé au gîte, je me jette sous la douche, saute dans des vêtements propres puis dans ma voiture, et pars à la recherche de mes camarades.
En traversant le village des Houches, je tombe miraculeusement sur...Stef en...vélo !!! Hallucination ??? Non ! Stef a en fait croisé JV qui lui a prêté son vélo pour rallier le gîte au plus vite. Il lui reste toutefois une sérieuse côte à avaler.
Contrairement à ce que m'a dit Julien au téléphone quelques minutes auparavant, Stef m'affirme que Julien et Amandine avancent en direction des Houches sur une route parallèle à la Nationale. J'emprunte donc cette route. Je ne les trouve pas. J'emprunte la nationale. Je ne les trouve pas davantage. J'emprunte une 3ème route parallèle aux 2 autres et finis par les croiser. Ouf. Petite explication à 3, histoire de se défouler. Vu le temps perdu, il est manifeste que nous ne pourrons pas faire un aller-retour à Champex avant le restau. J'estime qu'il n'est pas raisonnable d'envisager 3 heures de route juste après le restau, la fatigue du jour et quelques pintes de bière dans le nez (surtout que, rappelons-le, Julien est désormais extradé de Suisse !). Je propose donc un aller-retour le lendemain de bonne heure, ce qui n'enchante guère les intéressés. Passer la soirée et la nuit sans vêtements de rechange, on peut les comprendre !
Je les ramène donc en voiture au gîte où nous retrouvons Stef débarrassé de son vélo et où ils peuvent enfin prendre une bonne douche : pour les rhabiller, c'est un vrai vide-grenier, chacun trouve une paire de chaussettes, un caleçon, un pantalon, etc...afin d'équiper à peu près décemment nos 2 compères.
Nous nous retrouvons donc au restau à l'heure dite, dans une ambiance un peu tendue qui se déridera au fil des
bières et des minutes. JV nous y rejoint quelques instants. Stef, Julien et Amandine me font l'amitié de m'offrir cet excellent repas de clôture : qu'ils en soient de nouveau remerciés, c'était un réel plaisir !
A l'issue du dîner, je me sens finalement d'attaque pour un
aller-retour immédiat à Champex.
Ainsi, après 3 heures de route et avoir croisé 3 cerfs, 2 chevreuils, 5 chamois et une vingtaine de renards sur notre trajet, nous nous effondrons sur notre couchette des Houches aux environs de 3 heures du mat. Une bien belle journée en somme !
Puisqu'il faut conclure, j'ai passé 3 excellentes journées de trail en non moins excellente compagnie ; la session d'entraînement à l'UTMB à été tip top puisque, en à peu près
28 heures effectives, nous avons couvert
175 km et 10500m D+ à une allure globalement très honorable...et les petits dérapages du dernier jour n'ont d'intérêt que par le sel qu'ils apportent à ce modeste récit.
A refaire, ailleurs. "
Bruno Lagarde -
http://nice.asptt.com/